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Entreprise : Eviter une lourde fiscalité en cas de décès du dirigeant de société ?
Afin d'éviter une taxation exceptionnelle en matière d'impôt sur les sociétés et de droits de mutation à titre gratuit, il existe un montage à mettre en oeuvre avec la banque et l'assureur.

SCI, emprunt et assurance-décès : sécuriser la transmission et éviter les pièges fiscaux
Lorsqu’une société (souvent une SCI) acquiert un immeuble financé par un emprunt bancaire, il est courant que les associés contractent chacun une assurance-décès afin de garantir le prêteur. Ce montage, apparemment protecteur, peut pourtant se révéler très défavorable pour les héritiers et générer une fiscalité lourde. L’analyse et la mise en place de solutions adaptées sont donc essentielles pour concilier sécurité de l’opération, pérennité patrimoniale et optimisation fiscale.
1. Le schéma classique : quels risques ?
Dans le montage traditionnel, le contrat d’assurance-décès désigne la banque créancière comme bénéficiaire direct, à hauteur de la dette restant due. À première vue, cela paraît logique : le décès d’un associé entraîne le remboursement immédiat du prêt, garantissant l’établissement bancaire et libérant la société de sa dette. Pourtant, cette logique comporte deux effets pervers majeurs pour les héritiers :
- Alourdissement des droits de succession : l’extinction de la dette accroît mécaniquement la valeur nette taxable des parts sociales transmises, augmentant la facture successorale pour les héritiers.
- Fiscalité pénalisante pour les sociétés à l’IS : le remboursement de la dette par l’assureur est considéré comme un produit exceptionnel, imposable au titre de l’impôt sur les sociétés, avec des conséquences fiscales parfois très lourdes.
➡️ Ainsi, ce qui devait protéger la société et la famille peut, en réalité, transformer un décès en choc patrimonial et fiscal.
2. La solution alternative : désigner les héritiers comme bénéficiaires
Pour éviter ces écueils, un schéma plus protecteur peut être mis en place. Il consiste à :
- Prévoir dans le contrat de prêt une clause d’exigibilité anticipée en cas de décès du dirigeant (clause usuelle en pratique) ;
- Désigner comme bénéficiaires de l’assurance-décès non pas la banque, mais les héritiers majeurs du souscripteur ;
- À charge pour ces héritiers de nantir la créance d’assurance au profit de la banque dès l’acceptation du contrat.
Ce montage a plusieurs avantages déterminants :
- La dette de la SCI est remboursée par l’assurance, mais remplacée par une créance de l’héritier bénéficiaire : pas d’augmentation de la valeur nette taxable, et donc pas de surcoût en droits de succession.
- La SCI soumise à l’IS ne constate aucun produit exceptionnel imposable : neutralité fiscale.
- Le bénéficiaire héritier perçoit, en outre, un capital « hors succession » correspondant au reliquat non attribué à la banque.
3. Conditions et précautions à respecter
La réussite de ce montage repose sur plusieurs points de vigilance :
- Les bénéficiaires doivent accepter expressément leur désignation et avoir la capacité juridique de nantir leur créance. ➡️ Cela exclut les enfants mineurs ou à naître, sauf recours à une société civile familiale associant tous les membres.
- La clause doit être rédigée avec soin et validée par la banque et l’assureur pour garantir son efficacité.
- Il est recommandé de désigner en priorité le conjoint ou partenaire de PACS comme bénéficiaire, en l’absence d’héritiers majeurs disponibles.
⚠️ En pratique, la solidité du montage exige l’intervention d’un notaire, qui sécurise la rédaction et la mise en œuvre du nantissement.
4. Le rôle du Code civil : un appui juridique
Avant la réforme des sûretés, la pratique nécessitait parfois un séquestre notarial pour bloquer les fonds. Désormais, les articles 2363 et 2364 du Code civil simplifient considérablement la situation :
« Après notification, seul le créancier nanti reçoit valablement paiement de la créance donnée en nantissement tant en capital qu’en intérêts. » (art. 2363 C. civ.)
« Les sommes payées au titre de la créance nantie s’imputent sur la créance garantie lorsqu’elle est échue. […] En cas de défaillance du débiteur, le créancier affecte les fonds au remboursement de sa créance dans la limite des sommes impayées. » (art. 2364 C. civ.)
En clair, le nantissement par les héritiers bénéficiaires permet à la banque de percevoir immédiatement les fonds nécessaires, tout en préservant les droits successoraux et fiscaux de la famille. L’héritier qui a payé dispose d’un recours subrogatoire contre la société, ce qui évite l’effacement pur et simple de la dette dans la succession.
5. Optimiser le schéma : variantes et compléments
- Assurance croisée entre associés : prévoir une assurance-décès au profit des autres associés, afin qu’ils disposent des fonds nécessaires pour racheter la créance de compte courant ou les parts sociales du défunt.
- Convention de blocage des comptes courants : sécuriser la trésorerie de la SCI en prévoyant que la moitié (ou une autre quote-part) reste bloquée, évitant toute fragilisation financière en cas de décès.
- Désignation d’une société civile bénéficiaire : solution permettant d’associer dès l’origine les enfants mineurs, tout en maintenant la cohérence du montage et la continuité familiale.
6. Limites et points de vigilance
Malgré ses atouts, ce schéma n’est pas sans contraintes :
- La déductibilité fiscale des primes d’assurance reste très limitée, voire refusée par l’administration fiscale.
- Le bénéficiaire doit survivre jusqu’au dénouement du contrat, ce qui peut être un frein pour l’acceptation de la banque.
- La mise en place suppose une concertation étroite entre la société, la banque, l’assureur et le notaire, afin d’éviter tout blocage ou remise en cause.
Conclusion : l’importance de l’accompagnement notarial
Le schéma proposé permet d’éviter les effets pervers du montage classique : pas de droits de succession accrus, pas de fiscalité imprévue à l’IS, et une meilleure protection des héritiers grâce au recours subrogatoire. Il rend inutile le séquestre notarial autrefois pratiqué, mais l’intervention du notaire demeure essentielle pour sécuriser la clause de nantissement, coordonner les parties et, le cas échéant, créer une société civile familiale adaptée. C’est une démarche stratégique pour protéger à la fois la société, les associés survivants et les héritiers.
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