Protection du compagnon survivant : logement, transmissions et bonnes pratiques (Guide 2025)
Mariage, PACS ou concubinage : les protections du survivant ne sont ni identiques ni automatiques. Ce guide exhaustif présente, dans un langage clair, les règles utilisables en pratique pour sécuriser le logement du couple, organiser la transmission (avec ou sans enfants), éviter les conflits et optimiser les impacts civils et fiscaux. Vous y trouverez une synthèse des régimes, des stratégies notariales concrètes (clauses, démembrements, SCI), des cas pratiques, des FAQ et des check-lists prêtes à l’emploi.
1) Statut du couple et cadre patrimonial : les vrais écarts entre mariage, PACS et concubinage
1.1. Mariage : protections automatiques et « boîte à outils » la plus large
Le mariage offre la protection la plus robuste « par défaut ». Au régime légal de la communauté réduite aux acquêts —
qui partage les acquisitions du mariage — s’ajoute la possibilité d’installer des avantages matrimoniaux (préciput,
attribution intégrale/partielle, société d’acquêts en séparation de biens, partage inégal, etc.). Ces avantages, étant
de nature matrimoniale (et non libérale), s’articulent de manière privilégiée avec la succession et
renforcent puissamment les droits du survivant, notamment sur le logement et le patrimoine commun. En présence d’enfants
d’un autre lit, il faut toutefois anticiper l’action en retranchement qui peut limiter un avantage jugé excessif.
1.2. PACS : une protection partielle, à compléter par des actes
Par défaut, le PACS relève d’un cadre séparatiste : chacun reste propriétaire de ses biens et revenus.
Le partenaire pacsé n’est pas héritier légal et ne bénéficie pas du droit viager au logement du conjoint. Pour autant,
le partenaire pacsé est exonéré de droits de succession sur les libéralités reçues (comme un époux),
ce qui en fait un bon terrain pour des stratégies testamentaires et contractuelles : testament d’usufruit/usage,
conventions d’acquisition, clauses de jouissance, etc. La protection est donc possible, mais elle n’est pas automatique :
elle doit être construite avec des actes précis.
1.3. Concubinage : liberté contractuelle, mais pas d’héritage légal
Le concubin n’est ni héritier ni protégé par un « régime » légal. C’est une situation à fort besoin d’anticipation :
convention d’indivision, conventions d’occupation, bail, testament calibré, voire SCI pour organiser pouvoirs et jouissance.
Fiscalement, les transmissions entre concubins sont lourdes (barème à 60 % en l’absence de lien juridique),
ce qui incite à privilégier des solutions alternatives et une planification méticuleuse,
sans ignorer les limites liées aux réserves héréditaires des enfants.
Thème
Mariage
PACS
Concubinage
Héritage légal du survivant
Oui (droits légaux + viager logement)
Non (testament requis)
Non (testament requis, fiscalité lourde)
Logement du couple
Protections fortes (bail + droit viager)
Protections partielles (bail, droit d’un an)
Transfert bail possible sous conditions, pas de viager
Fiscalité en succession
Exonération
Exonération
60 % (sauf montage spécifique)
Outils de protection
Avantages matrimoniaux, donations, testaments
Testaments, conventions, SCI
Conventions, testaments, SCI (avec prudence)
2) Le logement du couple : ce qui est automatique, ce qui doit être prévu
2.1. Si le logement est loué : droit au bail et transferts
Pour un bail d’habitation, l’article « droit au bail conjugal » protège fortement les époux (cotitularité réputée,
maintien au décès). Les partenaires pacsés peuvent, sous conditions, bénéficier d’une logique voisine. En pratique,
il est crucial d’organiser la co-titularité dans le bail (ou, a minima, de vérifier les clauses)
et de documenter la situation de vie commune (justificatifs) en cas de transfert à statuer.
En présence de descendants, des demandes concurrentes (conjoint/partenaire/descendant) peuvent naître,
et c’est parfois le juge qui arbitrera.
2.2. Si le logement est la propriété d’un membre du couple
Le conjoint survivant bénéficie d’un droit temporaire d’occupation (un an) et, sauf volonté contraire,
d’un droit viager au logement (habitation + usage du mobilier). Le partenaire pacsé et le concubin, eux,
n’ont pas ce droit viager automatique : d’où l’importance d’un aménagement avant le décès,
via un testament (legs d’usufruit/usage), une convention de jouissance, ou une structuration en SCI donnant au survivant
des pouvoirs d’occupation et de gestion. En copropriété, pensez à vérifier les règlements (animaux, sous-location,
usage mixte) qui peuvent, à terme, nuire au maintien paisible dans les lieux si rien n’est anticipé.
2.3. Droit temporaire d’un an : qui y a droit, et comment l’activer
Le droit d’un an permet au survivant de demeurer dans le logement et d’en utiliser le mobilier, le temps d’organiser la succession.
Il est de droit pour le conjoint, et existe aussi pour le partenaire pacsé selon un régime moins protecteur. Il ne règle pas « tout » :
si le survivant veut rester au-delà, il faut avoir anticipé (viager légal pour le conjoint,
clause/testament/SCI pour les autres). En pratique, l’activation se fait par la preuve de la résidence principale et la notification
aux autres héritiers/au notaire ; le coût des charges courantes et de certaines taxes doit être réparti selon les règles applicables
(usufruit/usage, indivision, etc.).
3) Anticiper avec un notaire : clauses, pactes et montages utiles
3.1. Avantages matrimoniaux (époux) : l’outil le plus puissant
Préciput (droit de prélever tel bien commun — le logement — hors partage),
attribution intégrale ou partielle de communauté, partage inégal,
société d’acquêts en séparation de biens… ces outils permettent de tailler un costume « sur-mesure »
pour protéger le survivant. Le grand intérêt est de renforcer ses droits sans passer par une libéralité,
donc avec des conséquences successorales « allégées ». Il faut toutefois évaluer la présence d’enfants non communs et
le risque d’action en retranchement. Dans les familles recomposées, l’association d’un avantage matrimonial
mesuré et d’un testament peut donner un excellent compromis.
3.2. Testaments et pactes au profit du partenaire/concubin
Pour un partenaire ou un concubin, la base est le testament : legs d’usufruit (ou d’habitation) du logement,
dispositions graduelles, charges de maintien ou d’entretien… Il faut ici calibrer la libéralité à la
quotité disponible (réserve des enfants), sinon la réduction guettera. Évitez les montages assimilables à des
pactes sur succession future. Les clauses d’accroissement ou de faculté d’acquisition (par exemple sur un bien commun ou
en indivision) peuvent être envisagées, mais elles doivent être rédigées avec soin pour ne pas être requalifiées.
3.3. Financement de l’indemnité de réduction : la « face cachée » du projet
Si la libéralité au profit du survivant dépasse la quotité disponible, les héritiers réservataires peuvent demander réduction
et imposer une indemnité. Anticiper le financement de cette éventualité (assurance-vie, clause de rachat,
réserve de liquidités, assurance emprunteur, etc.) évite que le survivant doive vendre le logement pour payer les enfants.
Le notaire peut simuler les niveaux de réduction selon diverses hypothèses (valeur du bien, nombre d’enfants, âge).
4) Démembrement, usufruit et article 917 : forces, limites et nouveaux réflexes
4.1. Pourquoi le démembrement séduit… et quand il déçoit
Leguer l’usufruit du logement au survivant (avec nue-propriété aux enfants) est une idée logique : le survivant
reste chez lui, les enfants recevront la pleine propriété au décès. Entre époux, c’est souvent idéal, car la quotité disponible
spéciale entre époux offre de l’aisance. Entre partenaires/concubins, la solution est plus fragile, car la libéralité
s’impute sur la quotité disponible ordinaire et s’expose davantage à la réduction, surtout depuis que l’imputation « en assiette »
(usufruit sur usufruit) s’est imposée en jurisprudence. Résultat : montages à resserrer et à documenter.
4.2. L’article 917 : un « joker » qui dépend… des enfants
En cas d’excès, les réservataires choisissent : soit laisser l’usufruit s’exécuter (sans indemnité), soit abandonner la pleine
propriété de la quotité disponible au profit du gratifié (créant une indivision). Le survivant ne maîtrise pas ce choix.
Autrement dit, l’article 917 ne garantit rien à l’avance : il faut donc bâtir un plan robuste sans miser sur ce mécanisme.
4.3. Démembrements croisés en indivision : pourquoi les éviter
Acheter à deux en indivision avec des usufruits croisés est source d’insécurité : effets civils confus, risques
de requalification, froncement de sourcils du fisc, conflits de liquidations… Dans la pratique notariale, on privilégie des schémas
clairs : usufruit/usage via testament ou clause bien rédigée, ou recours à une SCI aux statuts protecteurs.
5) La SCI patrimoniale au service du couple : quand, pourquoi, comment
5.1. Les atouts concrets
Une SCI permet d’isoler le logement (ou un parc immobilier), d’organiser les pouvoirs (gérance, décisions
importantes) et de prévoir la jouissance (droit d’habiter pour le survivant, limites de cession, agréments).
Les statuts peuvent « verrouiller » la conservation du bien et donner au survivant un contrôle opérationnel :
droit de rester dans les lieux, de voter certaines décisions, de refuser des cessions non souhaitées. En présence d’enfants,
il est possible d’aménager l’entrée progressive au capital (donations de parts, démembrement des titres).
5.2. Points d’attention
La SCI n’est pas un « bouclier » universel : elle n’évite ni la réduction des libéralités ni la réserve des descendants.
Les clauses doivent respecter l’ordre public successoral et être financièrement soutenables (charges/impôts). Sur le plan fiscal,
on veille au régime (IR/IS), à la cohérence des loyers internes, et à l’articulation avec l’assurance emprunteur. Enfin, la SCI
suppose une discipline (comptes courants d’associés, assemblées, statuts tenus à jour) : c’est une solution
d’ordre, pas une cachette.
5.3. Quand la SCI est préférable à l’indivision
L’indivision impose l’unanimité pour les actes les plus lourds et subit la règle « nul n’est tenu de rester en indivision ».
La SCI, elle, offre des majorités statutaires, un agrément des cessionnaires, une gérance,
et peut déployer des clauses de préférence ou d’inaliénabilité temporaires (proportionnées).
Dans les familles recomposées, c’est souvent la meilleure façon de concilier pouvoirs du survivant et
droits des enfants.
6) Scénarios types & matrices de décision
6.1. Époux, enfants communs, logement commun
Objectif : que le survivant garde le logement sans friction, ni avec les enfants ni fiscalement.
Outils : préciput sur le logement, attribution de communauté ciblée,
ou legs d’usufruit en appoint. Avantages : stabilité, faible risque de réduction.
Points d’attention : actualiser régulièrement le contrat de mariage, vérifier l’assurance emprunteur
(baisse de la charge pour le survivant).
6.2. PACS, un enfant commun et un enfant d’un premier lit
Objectif : protéger le partenaire sans léser l’enfant du premier lit.
Outils : testament d’usage/habitation du logement au profit du partenaire,
SCI avec pouvoirs de gestion au survivant, clause de préférence en cas de cession.
Mesures : simulation de la quotité disponible, financement d’une éventuelle indemnité de réduction
(assurance-vie dédiée), information anticipée de la fratrie pour apaiser les tensions.
6.3. Concubins, logement au nom d’un seul, pas d’enfant
Objectif : maintien du partenaire dans les lieux et liberté finale de transmettre.
Outils : testament (legs d’habitation viager), convention d’occupation,
voire transformation en PACS ou mariage selon le projet.
Avantage : exonération immédiate si passage au PACS/mariage ; sinon, calibrage fin pour
éviter la taxation lourde du concubin.
À vérifier : charges du logement, capacités financières réelles du survivant.
6.4. Famille recomposée, résidence secondaire en indivision
Objectif : éviter les blocages et la vente forcée.
Outils : passer le bien en SCI, statuts prévoyant majorités, agrément et
droit d’usage au survivant, avec calendrier d’occupation. Avantage : pacifie la gestion,
évite la sortie immédiate des enfants du premier lit. À prévoir : gouvernance claire et
modalités de rachat des parts (valorisation, délais).
7) Check-lists opérationnelles
7.1. Sécuriser le logement du survivant
Identifier la nature du logement (bail / propriété / SCI).
Vérifier les droits légaux (droit au bail, droit d’un an, viager pour le conjoint).
Simuler réserve/quotité disponible et éventuelle réduction.
Prévoir le financement d’une indemnité de réduction.
Documenter : actes notariés, preuves de résidence, clauses statutaires.
7.2. Éviter les conflits futurs
Informer les enfants (sans les « engager » juridiquement) du schéma retenu.
Éviter les démembrements croisés en indivision.
Privilégier des clauses simples et exécutables (préciput, usage/habitation, agrément).
Mettre à jour après chaque grand événement (naissance, achat, divorce, maladie).
7.3. Piloter la fiscalité
Exonération de succession : effective pour conjoint et partenaire pacsé (sur les libéralités).
Concubins : arbitrer entre donation graduelle, assurance-vie, SCI…
Capital décès/assurance-vie : soigner la clause bénéficiaire, vérifier l’articulation avec le projet.
8) FAQ pratique
Le partenaire pacsé a-t-il les mêmes droits que le conjoint sur le logement ?
Non. Il bénéficie de protections partielles (droit d’un an, transferts de bail selon les cas)
mais pas du droit viager au logement réservé au conjoint. Il faut donc anticiper par
des actes (testament, conventions, SCI) si l’on veut un maintien durable.
Un legs d’usufruit au profit d’un concubin « passe »-t-il souvent ?
Il est fréquemment exposé à la réduction si la réserve des enfants est entamée.
L’imputation se fait « en assiette » : on impute de l’usufruit sur l’usufruit de la quotité disponible ;
si ça dépasse, réduction. Prévoir un plan B : réduction financée, clause alternative, ou montage via SCI.
La SCI protège-t-elle « de tout » ?
Non. Elle est un cadre d’organisation très efficace (pouvoirs, jouissance, agrément),
mais elle n’abolit ni la réserve des enfants ni les règles de réduction. Les statuts doivent être solides
et compatibles avec le droit des successions.
Faut-il systématiquement se marier pour protéger le survivant ?
Pas forcément, mais le mariage donne des protections automatiques et une boîte à outils
plus large (avantages matrimoniaux). Selon votre projet (enfants d’un autre lit, fiscalité, valeurs familiales),
on peut atteindre un bon niveau de protection en PACS/concubinage avec un véritable plan
(testament + convention + SCI).
9) Erreurs fréquentes & bonnes pratiques
9.1. Croire que « l’amour suffit » juridiquement
Sans acte, le survivant concubin n’a pas d’héritage légal et risque la sortie rapide du logement.
Sans aménagement, le partenaire pacsé n’a pas le viager. La préparation ne tue pas le romantisme :
elle protège le foyer.
9.2. Oublier le financement de la réduction
Une libéralité au-delà de la quotité disponible peut être réduite : il faut prévoir
comment payer la différence (assurance-vie, liquidités, échelonnement)
pour éviter la vente forcée du logement.
9.3. Démembrements croisés et indivision « usine à gaz »
Évitez les schémas trop complexes qui vieillissent mal et se retournent contre vous au premier conflit.
Privilégiez des montages clairs et testés en pratique notariale.
9.4. Statuts de SCI copiés-collés
Les statuts doivent être écrits pour votre famille, pas pour « une famille en général ».
Pouvoirs de gérance, agrément, clauses de préférence, droits d’occupation :
autant de curseurs à placer au millimètre.
10) Conclusion & mise en œuvre : faites-vous accompagner
Protéger le compagnon survivant, c’est arbitrer entre droits légaux, libertés contractuelles, contraintes successorales et fiscalité. Le mariage demeure la voie la plus simple pour une protection automatique (notamment du logement), mais PACS et concubinage peuvent, avec des actes bien calibrés (testament, conventions, SCI), offrir un résultat sûr et durable.
La différence entre un schéma théorique et une solution qui « fonctionne » le jour venu se joue dans les détails : exactitude des clauses, chiffrage de la réserve, gestion de la réduction, pouvoirs statutaires, chronologie des actes, articulation avec le financement, l’assurance et la copropriété. Un notaire vous aidera à transformer vos intentions en un dispositif opérationnel, compréhensible par tous et prêt à l’épreuve du temps.
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